Le Baromètre du cacao 2025 révèle une crise profonde au cœur de l’or brun. Malgré des prix mondiaux record, les producteurs d’Afrique de l’Ouest restent prisonniers d’un modèle qui les appauvrit, sur fond de changement climatique, déforestation et dérégulation politique.
C’est le meilleur des temps et le pire des temps pour le cacao. Alors que les prix flambent sur les marchés mondiaux, atteignant des niveaux jamais vus depuis des décennies, la grande majorité des producteurs continuent de vivre dans la précarité.

Le Baromètre du cacao 2025, publié par Antonie C. Fountain et Friedel Huetz-Adams, dresse un tableau saisissant d’un secteur « à la croisée des chemins ». En Côte d’Ivoire et au Ghana, qui assurent plus de 60 % de la production mondiale, les revenus des producteurs n’ont presque pas augmenté, malgré la hausse historique du prix du cacao.
« Cette flambée des prix coexiste avec de graves difficultés financières pour les cultivateurs dont les récoltes ont été détruites », notent les auteurs.
Des producteurs étranglés malgré la ruée vers l’or brun
Les raisons de cette crise sont multiples : mauvaises récoltes, vieillissement des arbres, maladies, effets du changement climatique et sous-investissement chronique. Résultat : la production chute, les revenus stagnent, et les coopératives locales peinent à survivre.
Pendant ce temps, de nouveaux acteurs — Brésil, Pérou, Équateur — cherchent à profiter de la pénurie mondiale pour s’imposer. Mais cette ruée vers la production risque d’accentuer la déforestation et de reproduire les erreurs du passé.
Un modèle à bout de souffle
Le rapport estime à 10 milliards de dollars par an l’écart entre le revenu réel des producteurs et le revenu vital nécessaire à une vie décente. Sans réforme structurelle, les crises se répéteront.
Les auteurs plaident pour un changement radical : meilleure rémunération, partage des risques avec les producteurs, transparence sur les pratiques commerciales et gouvernance plus juste.
« Le revenu vital n’est pas un luxe : c’est un droit humain », insiste le Baromètre.
La planète paie aussi le prix
La filière du cacao est également pointée du doigt pour sa responsabilité dans la déforestation et la perte de biodiversité. En Côte d’Ivoire, plus de 80 % des forêts ont disparu en 60 ans. Les nouvelles zones de production, notamment en Afrique centrale, risquent de subir le même sort.
Face à cela, les auteurs appellent à une transition vers des systèmes agroforestiers durables, combinant cacao et arbres d’ombrage, afin de restaurer les sols et limiter les émissions de carbone.
« Une chaîne d’approvisionnement durable est aussi une chaîne compétitive », conclut le rapport, en appelant à un sursaut collectif de l’industrie.
Fulgence Kanon























